Yuval Pick /// La fin de sa résidence annonce la première de FutureNow

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Lors de sa première période de résidence, en septembre, Yuval Pick nous a offert un petit entretien sur son processus créatif pour la première de sa nouvelle pièce FutureNow. Au-delà d’un simple investissement des lieux, il a créé une nouvelle énergie entre les murs des studios et a offert un beau lancement au programme AU•TOUR DE.

 

Est-ce que tu pourrais me parler de ta période de résidence au sein du TROIS C-L ?

La résidence au TROIS C-L est venu dans un moment très important parce que cette création FutureNow, je l’ai lancé pendant la période Covid. Je l’ai plus lancé comme une forme de recherche autour des improvisations guidées. L’idée était de travailler, et de documenter la mémoire de mes danseurs, à partir de deux questions « quel enfant créatif étiez-vous ? », « quelle action de créativité vous vous rappelez en tant qu’enfant » / « quand est-ce que vous vous êtes senti la première fois différent.e ? ».

La première question répond à mon intérêt de mettre en scène l’enfant créateur. On porte, cette force créative, en nous toute la vie. C’est très important de se connecter avec cette créativité. Il y a l’audace, le courage, les notions d’exploration, d’authenticité de la découverte et de créer avec ou à partir de rien. Quand je parle de créer avec rien, je ne parle pas de créer quelque chose d’artistique. Les personnes pensent que la créativité est liée à l’artistique. La créativité elle est dans tous les jours, dans notre vie, comment on organise notre routine ? Comment on améliore notre vie par une forme de créativité ? Quand on réinvente, on réorganise, on pense autrement aux relations, aux situations … Cela est pour moi la créativité. J’ai envie de partager cela avec mes danseurs et le public.

La notion de la différence, c’est la question de mon travail, c’est l’autre, et comment je peux trouver ma place dans un groupe tout en étant différent. Et comment le groupe, avec toutes les identités différentes, accepte et vit avec cette différence. C’est une question essentielle dans ma recherche chorégraphique. Je travaille beaucoup sur l’espace, la notion de singularité ainsi que sur la contribution d’un collectif ou d’un groupe autour d’une action commune.

© Sébastien Erôme

 

Est-ce que l’espace de la Banannefabrik a permis d’explorer cette singularité ?

Chez nous, nous sommes toujours dans une situation « hors les murs » et être ici en résidence était essentiel pour nous, cela nous a permis de travailler sur les sons et la lumière. Le travail sonore est essentiel pour cette pièce car on documente le récit que les danseurs racontent. C’était très important pour moi d’avoir tous les éléments techniques et d’être ici en résidence m’a donné l’opportunité d’explorer tous ces éléments, et les costumes aussi. Il faut dire que l’ambiance ici est une ambiance de créativité que j’apprécie énormément, c’est un lieu de création qui m’inspire. Non pas parce qu’il y a des règles mais parce qu’il y a une ambiance créative, on rentre dans une maison de fabrique. Nous on est au CCNR, quand on rentre ici on a une ambiance différente et c’est très inspirant. Il y a quelque chose de très inspirant dans cette maison.

 

Tu évoques souvent la notion de l’enfant créatif. La pièce FutureNow est-elle seulement pensée pour un jeune public ?

Non pas uniquement, c’est pour les « jeunes de cœur ». L’enfant créatif reste avec nous toute notre vie et je pense qu’on a besoin de nous connecter avec cet enfant créatif. Parfois cela est accompagné de douleur mais si on se concentre et qu’on trouve les moyens de se connecter avec cet enhousiasme de découverte, de faire quelque chose avec rien, de prendre le plaisir avec rien et d’être dans l’action et non dans l’observation, cela peut emmener énormément de joie. Mais l’enfance peut aussi être liée à une forme de peur, car il y a peut-être une forme de douleur, et il est important de se connecter à une forme d’intuitivité. A quelque chose d’audacieux et de courageux qui vit dans le moment, dans l’action même sans se faire une réflexion sur ce que je fais pour être totalement dans l’action.

 

Lors de la masterclass, as-tu réussi à explorer les enfants créatifs de chacun ?

Je n’ai pas vraiment exploré les enfants intérieurs de chacun mais plutôt comment ils peuvent être plus audacieux et comment ils traitent l’inconnu. Qu’est-ce qu’il y a derrière l’enveloppe corporelle, l’espace qui n’est pas visible à l’œil nu ? Comment il explore l’espace qu’on ne voit pas ? Comment il explore l’autre, qui est un inconnu ? Et comment on sort de notre centre ? Comment tout en restant aligné avec moi-même je peux créer des situations asymétriques ? Comment je sors de mon axe ?

Être aligné ce n’est pas forcément être redressé par rapport au centre du corps. Je peux être aligné avec moi-même et tout le temps être en train de tomber. Être aligné est une forme d’état d’esprit. Parfois, en tant que chorégraphe, je travaille sur la ligne droite. Cependant la verticalité ne peut pas être une action ou une proposition, c’est une situation. Ce n’est pas l’absolu mais une situation possible. L’alignement n’est pas toujours lié à une forme de redressement sur une ligne droite centrale.